Le livre numérique gratuit de Eléa Coblan

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De la guerre des intelligences à la mort de la mort... Le vrai peut, quelquefois, n'être pas vraisemblable (Boileau). La science dépasse la fiction. Google s'implique activement dans ces sujets, il a créé en 2013, dans le complexe secret Google X Lab, une société de biotechnologies avec pour objectif la lutte contre le vieillissement et le projet de déjouer la mort. Cette société se nomme Calico (California Life Company).

Depuis quelques années, Google soutient la philosophie transhumaniste. Son co-fondateur Larry Page a engagé en 2012 le pape de ce mouvement comme directeur du développement, Ray Kurtzweil. L'ambition stratégique consiste à cheminer vers la singularité technologique qui doit aboutir à l'avènement d'une intelligence artificielle bien supérieure aux capacités de notre cerveau humain. Selon Larry Page, « Si on résout le cancer, on ajoute environ trois ans à l'espérance de vie moyenne. On pense que résoudre le cancer serait ce truc énorme qui changerait le monde. Mais quand on prend un peu de distance on voit que, oui, il y a énormément de cas tragiques de cancer, et c'est très très triste, mais, globalement, ce ne serait pas une si grande avancée que ça. »

Donc, on va plus loin...

Le transhumanisme, les trois principes fondateurs :
1- Le transhumanisme mécanique qui consiste à greffer une prothèse qui réagit aux commandes du cerveau.
2- Le transhumanisme génétique qui manipule le génome humain pour créer des hommes plus performants.
3- Le but ultime du transhumanisme qui est lié à la conscience : on télécharge sa conscience dans un ordinateur pour vivre éternellement afin de créer non pas des intelligences artificielles, mais des consciences artificielles.
Kurzweil explique que lorsque cet objectif sera atteint, toutes les religions, toutes les cultures, toutes les traditions humaines disparaîtront, comme aspirées dans un trou noir. On nommera ce transhumanisme ultime «singularité».

La conscience ?
Des amis vous diront, méfiants : «- Personne ne sait ce qu'est la conscience ».
Rétorquez-leur : « -  Non ! Mais, c'est comme pour l'électricité, on sait utiliser la lumière sans en comprendre sa cause initiale. On connaît les effets de la conscience, c'est sur eux que les efforts vont converger.
Pour les experts en neurosciences, la conscience est une série de qualias. Les qualias sont les expériences de base de notre vie quotidienne. Par exemple, la contrariété de recevoir une facture, l'émerveillement devant un beau paysage, la colère face à l'injustice, voir un objet en mouvement, d'une certaine couleur, etc... Il s'agit de recenser tous ces éléments réduits à leur stade minimal afin de les manipuler.
Néanmoins, il y a toujours un moins, cela serait bien trop simple ! Des travaux montrent que la conscience existe à l'état pur. Le Docteur Laplane, neurologue, ancien chef de service à la Pitié Salpêtrière, professeur honoraire à Sorbonne Université, décrit un curieux symptôme, la perte de l’auto-activation. Des malades atteints de ce mal sont incapables de faire quoi que ce soit de leur propre volonté. Si on les laisse devant la porte de leur maison, ils seront susceptibles d'y rester sans l'ouvrir jusqu'à ce qu'ils meurent de soif ou de faim. Si on leur dit : « Prenez la clé dans votre sac et mettez la dans la serrure pour entrer », ils le feront sans aucun problème. Ils doivent être en permanence en interaction avec d'autres personnes. S'ils sont seuls, ils en sont réduits à un état végétatif.
Si on leur demande :
- «Êtes-vous conscient ?»
Ils répondront que oui.
- « Conscient de quoi ? »
- « De rien ! »
L'état de leur conscience est vide. Des chercheurs ont démontré qu'il ne suffit pas de stimuler une zone cérébrale pour créer la volonté et l'action.
La conscience serait un matériau universel, semblable au fer dont s'empare le forgeron pour réaliser un objet. Le forgeron crée l'objet mais il ne crée pas le fer. Le cerveau s'emparerait-il de cette conscience pour élaborer l'acte ?

Ça a l'air fou ? Pas tant que cela, compte tenu des personnalités qui y travaillent et qui financent ces travaux.

Qui sont ces technoprophètes du transhumanisme ? Tous riches et certains plus célèbres que d'autres, ce sont des personnalités marquantes du XXIème siècle : des penseurs, des scientifiques, des philosophes, des financiers, des farfelus...

1) Parmi les penseurs,
- le grand prophète du mouvement Ray Kurtzweil.
Il est né le 12 février 1948.
C'est un génie.
À 15 ans, il met au point un logiciel de reconnaissance de thèmes musicaux analysant les œuvres de compositeurs classiques, puis synthétisant ses propres chansons en imitant leurs styles. Les capacités de ce programme sont telles qu'en 1965 Ray est invité sur la chaîne CBS, à participer à l'émission I've Got a secret, où il interprète au piano une œuvre composée par un ordinateur de sa propre fabrication. La même année, il gagne pour cette invention le premier prix de l'International Science Fair et est également distingué par le Westinghouse Talent Search.
Il est le créateur de plusieurs entreprises pionnières dans le domaine du handicap et de la numérisation : OCR pour la reconnaissance optique de caractères, synthèse et reconnaissance vocales. Bruno a utilisé ces outils dont il explique l'usage dans Décents Chapitres pour les programmer et les adapter à mes rubriques lorsqu'on clique sur « Voix » ou « Commandes vocales ».
En parallèle, Ray poursuit un rêve fou : faire revivre son défunt père. Il a tout gardé de lui.
- Nick Bostrom, philosophe de formation, il a fondé la World Transhumanist Association (WTA) devenue Humanity +. Il pense que : "Nous pourrions vivre des vies meilleures par l'utilisation raisonnée des technologies".
- Max More, président d'Alcor, la plus grande société de cryogénisation (140 "clients"). Il écrit : "Nous remettons en question le caractère inévitable du vieillissement et de la mort".

2) Parmi les scientifiques.
- Aubrey De Grey, "bio gérontologue", veut guérir le vieillissement, considéré comme une simple maladie. Il annonce : "La première personne qui vivra mille ans est déjà née".
- Bill Maris, diplômé en neurosciences, il dirige Google Ventures, spécialisé dans la lutte contre le cancer. Selon lui, "la médecine doit sortir de l'âge de pierre". 
- Ken Hayworth, neurobiologiste, diplômé de Harvard, fondateur de la Brain Preservation Foundation. En 2012, il annonçait vouloir se suicider par injection létale pour ressusciter son esprit dans une enveloppe cybernétique. "La condition humaine m'énerve, dit-il. Nous avons une durée de vie très courte". 

3) Les soutiens financiers
- Sergey Brin et Larry Page, fondateurs de Google et créateurs de Calico.
- Peter Thiel. créateur du site de paiement en ligne PayPal et tête pensante de la Silicon Valley. Il ingurgite quotidiennement des hormones pour ralentir son processus de vieillissement et a montré un vif intérêt pour la cryogénisation. Selon lui, "il est impossible de fixer a priori les limites de notre durée de vie". 
- Larry Ellison, fondateur d'Oracle, considéré comme l'un des individus les plus riches de la planète. Il confie :"La mort n'a jamais eu de sens pour moi".

4) Les farfelus
- Natasha Vite-More, présidente du mouvement Humanity. Elle possède une plastique irréprochable et bien peu naturelle. Elle développe le concept de "primo-posthumain" avec l'idée de posséder un corps prothétique (composé de prothèses). Elle pense que : "Un jour, nous aurons un corps alternatif".
- Martine Rothblatt. Martin n'est devenu Martine qu'à 40 ans, après un long traitement aux hormones. A la tête de plusieurs entreprises, elle est le PDG le mieux payé du pays (salaire : 38 millions de dollars). Elle a créé son propre mouvement transhumaniste (Terasem). Elle en est convaincue: "Des programmes aussi [...] accessibles qu'iTunes permettront de faire revivre une personne d'une autre façon". 
- Dmitry Itskov. Milliardaire, il a lancé le projet Avatar, qui vise à transplanter un cerveau humain dans un corps robotisé (le sien).

Hors catégorie, Elon Musk a lancé Neuralink avec comme objectif de créer des interfaces hommes-machines pour augmenter nos cerveaux, condamnés à terme, selon le patron de Twitter, Tesla, SpaceX, par le « démon » de l’intelligence artificielle. Il suffit juste d'installer un petit implant qui fonctionnera de manière autonome et sans fil...

Que penser de tout cela ?
Pour nous y aider, j'ai recueilli quelques réflexions de Laurent Alexandre :
"Il n’y a aucun sens de la vie, Dieu n’existe pas, tout est contingent?! Sauf qu’on a créé un petit Frankenstein qui est l’IA faible et qu’on est bien emmerdé.
La seule chose qu’on est capable de faire, c’est non pas couper et castrer les GAFA, c’est de faire des faux procès… C’est la théâtralisation dans l’impuissance, publique et privée. Alors il faut qu’on se mette à travailler. Je suis le premier à dire que l’IA n’est pas un problème technologique, c’est un problème politique.
Par rapport à l’école, parce que je suis affolé de ce qu’on est en train de faire. Je radote, mais c’est ma thèse. Mon slogan : « il faut mettre des Montessori à la place des REP » [Réseaux d’éducation prioritaire], j’y crois profondément, sinon je pense qu’on va avoir une situation révolutionnaire."

Photo : Sagrada Familia, Barcelone. La cathédrale inachevée, la mémoire de tous les êtres vivants où sont gravés dans la pierre végétaux, animaux, humains. Antonin Gaudi, s'il avait vécu à notre époque, aurait pu piloter ces pionniers de la sauvegarde de nos consciences vers la conscience universelle de la beauté.

( Le 28/02/2021 )105